Informations Théoriques

 

Il existe pour chaque problème complexe une solution simple, directe… et fausse. (H. L. Mencken)

 

Il se trouve aujourd’hui une multitude d’approches et de courants théoriques dans le champ de l’étude du psychisme et de sa thérapeutique éventuelle. Deux principaux s’opposent cependant : celui fondé sur une approche cognitivo-comportementale et la psychanalyse.

 

La Thérapie Cognitivo-Comportementale (plus connue par son sigle : TCC)

 

Selon une définition en vigueur, celle-ci vise à remplacer les idées négatives et les comportements inadaptés par des pensées et des réactions en adéquation avec la réalité. L’article de Wikipedia intitulé « Psychothérapie cognitivo-comportementale » est à son propos bien documenté, y compris pour ce qui concerne les critiques dont elle fait l’objet.

En effet, une critique radicale en existe depuis fort longtemps qui paraît aujourd’hui un peu oubliée – témoin cet extrait d’un discours de Georges CANGUILHEM1 (in « Cahiers pour l’Analyse – Travaux du Cercle Epistémologique de l’Ecole Normale Supérieure) » à propos de « La psychologie comme science des réactions et du comportement » : Le psychologue contemporain est, le plus souvent, un praticien professionnel dont la « science » est tout entière inspirée par la recherche de « lois » de l’adaptation à un milieu socio-technique – et non pas à un milieu naturel – ce qui confère toujours à ses opérations de « mesure » une signification d’appréciation et une portée d’expertise. De sorte que le comportement du psychologue du comportement humain enferme quasi-obligatoirement une conviction de supériorité, une bonne conscience dirigiste, une mentalité de manager des relations de l’homme avec l’homme. Et c’est pourquoi il faut en venir à la question cynique : qui désigne les psychologues comme instruments de l’instrumentalisme ? A quoi reconnaît-on ceux des hommes qui sont dignes d’assigner à l’homme-instrument son rôle et sa fonction ? Qui oriente les orientateurs ?2

L’approche cognitivo-comportementale a incontestablement l’avantage de la simplicité - théorique et pratique. Elle tend, par sa visée adaptative, à se confondre avec une rééducation mais, sans la norme anatomo-physiologique des pratiques psychomotrices ou orthophoniques - sa référence à elle est la réalité, la réalité humaine. En ces temps où l’avènement de la techné décrit par Martin HEIDEGGER est cette réalité-même, l’interrogation ironique de Georges CANGUILHEM apparaît - plus que jamais - brûlante d’actualité.

 

La Psychanalyse

 

La psychanalyse fut découverte – ou inventée, puisque les deux termes sont équivalents3 -, on le sait, par Sigmund FREUD à l’orée du XXème siècle. Elle fait depuis l’objet d’un discours – dans la presse écrite, la télévision, les réseaux sociaux, la littérature psychanalytique elle-même - auquel s’applique fort bien la formule de Jacques DERRIDA à propos de la Philosophie : un discours ample jusqu’à se croire interminable4

Le postulat initial de la psychanalyse est pourtant fort simple ; FREUD l’expose de la manière la plus claire qui soit dans un article tardif intitulé Some elementary lessons in psycho-analysis5 : l'être-conscient ne peut pas être l’essence du psychique, il n’est qu’une de ses qualités […] le psychique en soi, quelle que soit sa nature, est inconscient. Il présente trois catégories de faits à l’appui de cette thèse : les idées incidentes (pensées qui surgissent toutes prêtes dans la conscience sans que l’on connaisse leur préparation), les lapsus et actes manqués (frayages de pensées, d’intentions, de désirs inconscients jusque dans la conscience) et la suggestion post-hypnotique (dans laquelle le sujet est amené à exercer une action dont il ne sait rien). Dès lors que cette affirmation - qui repose donc sur des faits observables - est admise, le reste de la théorie psychanalytique en découle, selon une élaboration accessible à tout un chacun (cette élaboration théorique n’est pas, comme on l’imagine parfois, une succession de propositions sensationnelles ou scandaleuses, mais un patient travail d’hypothèses, puis de validations ou d’infirmations de celles-ci).

Encore le pas franchi par FREUD n’est-il pas si radical qu’il y paraît, puisqu’il écrit dans le même article : [la conscience] reste la seule lumière qui nous guide et nous éclaire dans les ténèbres de la vie psychique [...] notre travail scientifique en psychologie consistera à traduire les processus inconscients en processus conscients. La ligne, la visée thérapeutique de la psychanalyse est exprimée là ; elle est également résumée dans une formule devenue célèbre : Wo es war, soll ich werden6 – dont le psychanalyste Jacques Lacan livre une traduction, certes complexe, mais extrêmement précise : Là où c’était, peut-on dire, là où s’était, voudrions-nous faire qu’on entendit, c’est mon devoir que je vienne à être7


1. Georges CANGUILHEM (1904-1995) est un médecin, philosophe et historien des sciences dont l’ouvrage le plus connu s’intitule : « Le Normal et le Pathologique ».

2. Extrait d’une conférence initialement prononcée au Collège Philosophie, le 18 Décembre 1958.

3. « invention » du latin invenire : trouver.

4. Jacques DERRIDA in « Marges de la Philosophie ».

5. Sigmund FREUD in « Résultats, Idées, Problèmes II ».

6. Sigmund FREUD in « Nouvelles Conférences d’Introduction à la Psychanalyse ».

7. Jacques LACAN in « Ecrits ».

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